Collectif national pour les droits des femmes

Familles ou pas ?

Moderniser le divorce ? Moderniser le couple ?

2002

Divorce sans juge, suppression du divorce pour faute… ces propositions vont-elles s’imposer ? Le rapport " Rénover le droit de la famille " avançait quelques questionnements.

Les ministres de la Justice et de la Famille annoncent des réformes apparemment plus radicales. Le désir de dépoussiérer le divorce ne doit pas dispenser d’une grande attention aux discriminations sociales et idéologiques que subissent encore les femmes. Ce n’est pas parce qu’on est à l’heure de la parité que les inégalités ont disparu, en particulier au sein du couple.

o Suppression du divorce pour faute ? Comment - alors qu’une récente enquête a confirmé la fréquence des violences conjugales - comment ignorer que les demandes de divorce formulées par les femmes sont assez parfois l’issue désespérée de situations intenables : violences, alcoolisme, abus sexuels, dettes insensées, abandon prolongé ? Faute ? " Grief grave " ? qu’importe le terme, il convient que la justice dise le droit au sein de la famille, au sein du domaine dit " privé ". Que les griefs subis n’entraînent pas automatiquement une compensation financière, soit. Mais on sait que les situations de déséquilibres financiers entre les deux partenaires sont souvent entretenues par la marginalisation sociale de la femme, et seul un examen attentif peut permettre d’en juger.

o Divorce sans juge ? On le voit, le jugement reste nécessaire dans les cas où le grief est dénoncé, mais qui ne sait la difficulté des personnes dominées à exprimer leur grief au grand jour ? Une partie, peut-être minime, des divorces par " consentement mutuel " risque aujourd’hui même d’être le résultat de pressions, et la généralisation d’un divorce sans juge favoriserait leur accroissement.

o La résidence alternée ? Nous demandons là aussi une extrême prudence. Le milieu social et culturel est déterminant pour que de tels arrangements ne pénalisent pas les femmes. On sait la situation de grande pauvreté où se trouve une majorité de femmes divorcées chargées d’enfants, il est à craindre que beaucoup d’entre elles ne voient s’accroître leurs problèmes financiers : ce sont elles qui pourvoient généralement aux dépenses lourdes, alors qu’elles n’auront plus droit à une pension alimentaire pour les enfants, et qu’elles n’auront plus que la moitié des allocations familiales. Par ailleurs, la résidence alternée ne convient pas à tous les enfants. Beaucoup d’entre eux ont besoin de stabilité, surtout après un divorce. Une règle trop générale provoquerait des catastrophes.

Certes, il faut trouver des moyens pour faire évoluer le sens de la paternité et le partage des responsabilités ! Mais les litiges autour du divorce et le prétendu " droit " à l’enfant ne sont pas les meilleures occasions d’avancer ! Les attitudes de revanche prédominent.

Les problèmes de responsabilité parentale nous semblent demander des mesures bien en amont. Notre collectif se bat pour des congés paternité à la naissance et des congés enfants malades pour le père, pour le remplacement de l’APE de 3 ans par un congé parental d’un an, sans rupture du contrat de travail, et dont une partie - dans l’idéal une moitié - serait affectée au père, et rémunérée à 80% du salaire (modèle suédois). Mais aussi de fréquentes campagnes d’opinion sur l’image de la femme, sur les rôles parentaux, qui sont toujours stéréotypés ! La proposition de débats citoyens dans quatre grandes villes est un élément très positif et rassurant. C’est une occasion de porter tous ces problèmes au grand jour.

Nous espérons que les associations seront considérées comme de vraies partenaires pour participer à cette élaboration. Il n’y a d’avancée réelle qu’en conjuguant les propositions des responsables et le débat citoyen.

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