Les divorces, surtout quand ils sont demandés par les femmes, révèlent de profonds dysfonctionnements. Les situations de violences, sous des formes diverses, parfois diffuses, toujours très intériorisées, ne sont pas souvent déclarées… surtout quand on supprime le “ divorce pour faute ” et qu’on renvoie tout au pénal ! Les pères violents, couverts par le non dit, pourront-ils continuer à exercer pouvoir et représailles sur leur ex-épouse, et par ricochet sur les enfants ? L’effacement du jugement pour faute va signifier l’impunité, et accroître l’irresponsabilité des hommes.
Or que signifie l’autorité parentale si les devoirs parentaux sont ignorés ? En dehors même des violences physiques ou morales, c’est souvent l’irresponsabilité qui mène au divorce. Les femmes n’en peuvent plus de tenir lieu à la fois de père et de mère, et de porter tout le fardeau des tâches domestiques, et elles jettent l’éponge : mieux vaut encore être seules. Que certains pères se ravisent alors et exigent des droits, qu’ils n’ont jamais assortis de devoirs, ne doit pas conduire à les leur octroyer.
Par ailleurs, la résidence alternée n’est pas forcément la bonne solution pour les enfants. Si le contact avec leur père est précieux pour eux – pour autant que celui-ci assume réellement son rôle et respecte aussi bien l’enfant que la mère – la systématisation du double foyer peut engendrer des troubles de comportement. Pour peu que les parents restent en conflit, c’est la catastrophe.
Notre réserve ne relève pas d’une défense partisane de privilèges. Nous ne voulons pas figer les rôles et conserver à tout prix la position des femmes, bien au contraire ! Nous œuvrons à ce que les hommes prennent plus à cœur leurs responsabilités au sein des familles, ce qui changera considérablement la donne au moment des divorces. Et nous savons que les couples où l’homme a pris toute sa place, sans chercher à évincer sa compagne, optent assez naturellement pour la résidence alternée. Mais cette solution n’est pas généralisable, elle n’est valable qu’avec le plein accord des parents et des enfants, et une très grande attention à l’évolution des choses.
Nous avons reçu copie d’une lettre ouverte envoyée par une association d’hommes canadiens luttant contre le sexisme. Elle fait état d’une expérience de 10 ans concernant une législation semblable au Canada, et recommande aux législateurs français la plus grande prudence.
Que des hommes soient vigilants montre que nos réticences ne sont pas liées à une guerre des sexes qui se prolongerait sans raison, mais à une mauvaise répartition des rôles parentaux. Le problème est à prendre en amont, dans l’éducation, dès la petite enfance, dans la lutte contre les stéréotypes, dans des mesures pour impliquer les hommes dans leurs responsabilités éducatives et familiales, et dans les tâches domestiques. Cette loi, prétendant redresser les choses quand elles sont déjà au point de rupture, ne fera qu’aviver les conflits si elle est appliquée sans une très grande prudence.